La pénurie des puces électroniques a fait plonger le marché automobile mondial. L’industrie tunisienne des composants automobiles, un secteur en devenir et qui dépend fortement du marché européen, en pâtit sévèrement.
Depuis le déclenchement de la pandémie du covid-19, l’industrie automobile fait face à une crise sans précédent. Certes, la reprise de l’activité des unités de production, après le grand confinement, a permis une certaine accalmie pour le secteur, mais les constructeurs automobiles ont dû affronter une deuxième crise, encore plus inquiétante : celle des semi-conducteurs. Les sous-traitants tunisiens, ainsi que les fabricants de composants automobiles installés en Tunisie, ont dû faire les frais d’une conjoncture mondiale marquée par le ralentissement de la production automobile.
Qu’appelle-t-on un semi-conducteur ?
Les semi-conducteurs sont fabriqués sous forme de plaques très fines composées de matériaux conducteurs de courant électrique. Ils sont utilisés pour produire des puces électroniques qui servent, à leur tour, à la fabrication de différents appareils comme les voitures et les équipements high-tech. Les fabricants de puces électroniques sous-traitent la production des semi-conducteurs à des fonderies spécialisées. Le fondeur taïwanais «Tsmc» est le plus grand producteur de semi-conducteurs au monde puisqu’il assure la fabrication de plus de 50% des semi-conducteurs de la planète et s’accapare
85 % du marché mondial des semi-conducteurs mesurant moins de 7 nm.
Les constructeurs automobiles se trouvent en concurrence avec l’industrie high tech
La pénurie des puces électroniques a fait son apparition, concomitamment au déclenchement de l’épidémie covid-19. Elle est principalement imputable à l’explosion de la demande dans le secteur de l’industrie High Tech (ordinateurs portables, téléviseurs, consoles de jeu) suite au recours massif au télétravail. La production des semi-conducteurs destinée au secteur automobile a largement baissé, et ce, au profit d’autres industries gourmandes en puces électroniques comme les ordinateurs, les smartphones et les objets connectés. Le marché mondial des semi-conducteurs a, de ce fait, augmenté de 10,8% en 2020 pour atteindre 442 milliards de dollars. Selon le cabinet d’études international IDC, le marché des semi-conducteurs connaîtra une croissance de 17,3% en 2021, et pourrait atteindre sa surcapacité en 2023.
L’industrie automobile tunisienne fragilisée
La pénurie des semi-conducteurs a particulièrement impacté l’industrie automobile. Elle a fait plonger le marché automobile mondial. Avec seulement 718.598 voitures neuves vendues, le marché européen, dont dépend fortement l’industrie des composants automobile en Tunisie, a accusé une baisse de 23,1% sur un an. Les grands constructeurs automobiles européens affichent, depuis le début de l’année, des ventes en baisse, ce qui s’est mal répercuté sur les fournisseurs et les sous-traitants, notamment ceux qui sont installés en Tunisie. « Cette pénurie a fragilisé l’industrie automobile en Tunisie. Plusieurs usines ont dû recourir au licenciement, d’autres ont réduit leurs capacités de production», a affirmé Nabhane Bouchaâla, président de la «Tunisian Automotive Association», lors de son intervention dans le cadre du webinaire «le secteur automobile face à une politique d’austérité» qui a été organisé, récemment par l’Iace. Il a ajouté que le retour à la normale n’interviendra pas avant mi-2023 et que cette tendance baissière du marché devrait se poursuivre en 2022. Il a précisé, dans ce sens, que l’absence de politique incitative et une éventuelle instauration de restrictions à l’import de voitures luxueuses pourraient impacter les décisions des grands constructeurs automobiles qui vont choisir de traiter avec d’autres fournisseurs basés ailleurs.
L’industrie des composants en Tunisie se ressent, en effet, du manque de visibilité sur le marché automobile mondial. C’est une véritable menace qui plane sur un secteur qui a éclos à peine il y a quelques années et qui est devenu une «success story » tunisienne. Rappelons, à cet égard, que l’’industrie des composants automobiles emploie plus de 85 mille personnes et génère près de 2,4 milliards d’euros de recettes en devises par an. Étant un secteur clé de l’économie tunisienne, il figure, également, parmi les secteurs qui paient le mieux.